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Dehors, l'orage grondait et je n'imaginais pas encore que la porte s'ouvrirait s'y violemment.

 

La journée avait mal débuté. Un réveil grincheux, un café trop léger pris au milieu de la vaisselle de la veille, des nids de poussière dans une maison au désordre ahurissant, et aucun programme de prévu, en dehors d’un footing pour me déstresser malgré le temps peu engageant qui s’offrait à moi dehors.

 

Sous les gouttes déjà inamicales qui me tombaient dessus, je courais... à en perdre le sens de la réalité, comme d’habitude. Au milieu du matelas des feuilles automnales, j’essayais avant tout de ne pas perdre mon souffle dans cette course contre moi-même. Une course contre la solitude. Un moment de flottement intense. Le seul moment où je me parlais. Mon cerveau et moi ne cessions de faire le point sur ma vie, au rythme de mes pas qui semblaient porter mon corps comme par automatisme. Mais les engrenages avaient besoin d’être huilés.... ça crissait sec... !

 

C’est à ce moment là que je l’ai vu. Il faut dire que je ne pouvais le rater : il s’est imposé devant moi, sorti de nulle part...  arrêtant ma course brusquement, et manquant de me faire trébucher. Je ressentis à ce moment-là une émotion dévastatrice me brûler la gorge, quelle peur ! Et pourtant il souriait, un sourire malicieux et avenant... et tenant une pancarte dans sa main droite, il m’enjoignit de la lire : « Faites un vœu et votre vie, de sa poussière, renaîtra ». Je me frottai les yeux. Encore un mauvais rêve. T’as trop abusé des antidépresseurs ces derniers temps, me répétais-je inlassablement. La solitude te joue des tours... J’ouvris les yeux à nouveau, et... plus personne. Il s’était volatilisé. Faut que t’ailles consulter, ma vieille, ça devient grave, me dis-je. La pluie commençait à forcir, les feuilles jaune orangé à virevolter autour de moi sous le vent de plus en plus insoutenable. Allez, rentre maintenant, t’en as assez vu pour aujourd’hui.

 

De retour à la maison, après une douche longue bien méritée, j’essayai de trouver une place sur le canapé recouvert de livres épars que j’avais dû laisser traîner la veille. J’en pris un, puis un autre, et comme d’habitude, les reposai immédiatement, lassée. J’allumai la télé, zappai de chaîne en chaîne, ne restant que deux minutes sur chacune d’entre elles, et finis par être happée par les sanglots. Dur constat. T’es seule, ma fille, ta maison est un capharnaüm, et la journée va être longue sous cette pluie... Rien, il n’y avait rien qui ne m’intéressait. Cette journée n’était que la suite logique des autres, et vautrée sur ce qui restait du canapé, j’entamai une longue descente vers l’immobilisme et le désespoir. C’est alors que j’ai repensé à cet être dans le parc. Arrête, ma vieille, tout ça ce sont des conneries de ton esprit, oublie vite ce que tu as vu...Et pourquoi ne pas faire ce vœu, finalement, je n’ai rien à perdre, et ça m’occupera deux minutes de ce temps interminable...

 

OK, je fais le vœu de me retrouver ce soir à 19 heures en charmante compagnie.  Je me mis à rire de ma propre stupidité. Mais après tout, j’étais toute seule dans ce fouillis incommensurable, perdue, sans appétit, sans envie aucune, et finalement, sans que personne ne se moque de moi en me voyant faire ce voeu... Premier rire de la journée. Ca ne peut me faire que du bien.

 

Et la journée passa ainsi, de fauteuil en fauteuil, du canapé au tapis, tantôt assise par terre à gribouiller quelques mots sur un vulgaire papier, tantôt debout à regarder, pétrifiée et pantoise, toute la poussière et le bordel accumulé depuis plusieurs semaines. Aucun goût à rien. Et l’orage grondait dehors, me clouant davantage dans ma torpeur.

 

Et puis 19 heures arrivèrent. Dans mes absences intemporelles de la journée, j’avais totalement oublié que j’avais fait une rencontre lors de mon footing qui allait bouleverser ma vie. C’est ainsi que dans un fracas absolument intempestif, la porte d’entrée s’ouvrit avec une violence inattendue. Et là, devant moi, se dressa un homme plutôt corpulent, plutôt dandy, au regard profond et au sourire ravageur, qui fit accélérer mes battements cardiaques jusqu’à m’amener à la limite de l’évanouissement.

 

- Tu as fait un vœu ce matin, me voilà. Je suis la pièce qu’il manque à ta vie, et à partir de maintenant, je ne te quitterai plus....

Il se mit à claquer des doigts, et chaque meuble retrouva sa place, la vaisselle se rangea toute seule, la penderie retrouva des allures impeccables, les livres retournèrent sur leur étagère et la poussière disparut.

 

Et c’est là que, dans un délire euphorique et telle une actrice de théâtre dans un mauvais rôle, je déclamai: « Il est des jours et des lunes, des saisons et des années où la poussière efface l'entendement ».

Tag(s) : #Textes des auteurs
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